Avoir le ventre noué, des papillons dans l’estomac, se faire de la bile… Bien avant que la réalité scientifique ne leur donne raison, les expressions populaires mettaient en avant le lien étroit entre notre ventre et nos émotions. Dorénavant, nous savons que 200 millions de neurones sont présents au niveau de l’intestin et que ce système nerveux entérique (intestin) communique de manière étroite avec le système nerveux central (cerveau). Mais en cas de déséquilibre intestinal, quels impacts y-a-t-il ? Enquête.
Déséquilibre de la flore intestinale : quel impact sur notre cerveau ?
La flore intestinale, parfois encore appelée microbiote intestinal, est l’ensemble des micro-organismes qui colonisent le tube digestif. Le tractus intestinal est ainsi peuplé de plus de 100 000 milliards de bactéries.
Des études récentes ont suggéré qu’en plus de ses fonctions métaboliques et immunitaires, la flore intestinale prendrait également part à la communication entre l’intestin et le cerveau et influencerait le fonctionnement cérébral.
Les conséquences d’un déséquilibre de la flore intestinale
Flore intestinale, stress et dépression
Les chercheurs se penchent aujourd’hui sur les liens possibles entre un déséquilibre de la flore intestinale (ou « dysbiose ») et certains troubles psychiques comme le stress ou la dépression.
- Des études menées chez l’animal avancent la possibilité d’un rôle modérateur du microbiote intestinal sur le stress. Une atténuation ou une exacerbation du comportement anxieux face à une situation de stress (1, 2, 3, 4) ont par exemple été constatées chez certains animaux dépourvus de microbiote.
- Des modifications de la composition du microbiote intestinal ont également été découvertes chez des rongeurs présentant un comportement de type dépressif (5).
- Par ailleurs, des études pilotes comparant les microbiotes intestinaux d’enfants souffrant d’un trouble de spectre autistique à ceux d’enfants témoins rapportent des différences notables (6, 7, 8, 9, 10) d’un point de vue bactériologique.
- Ces résultats ouvrent la porte à de nouveaux outils de diagnostic pour identifier l’autisme mais restent préliminaires et nécessitent d’être confirmés.
Flore intestinale et maladies neurodégénératives
D’autres études établissent des liens entre le microbiote intestinal et certaines maladies neurodégénératives comme la maladie de Parkinson, d’Alzheimer, etc.
- Une étude récente démontre une altération morphologique de la barrière épithéliale intestinale (11) et une potentielle dysbiose chez les patients atteints de la maladie de Parkinson (12)…
- En ce qui concerne la maladie d’Alzheimer (13), une étude démontre que des bactéries du microbiote intestinal ont la capacité de produire en quantité notable des peptides amyloïdes biologiquement similaires à ceux retrouvés dans le système nerveux central des malades…
- Là encore, aussi prometteuses soient ces recherches, elles devront être complétées et approfondies.
Quelques chiffres
- 200 millions de neurones présents au niveau de l’intestin (c’est autant que le cerveau d’un chien ou d’un chat !)
- 95% de la sérotonine, neurotransmetteur qui participe à la gestion des émotions, est synthétisée au niveau de l’intestin
- X10 : le nombre de micro-organismes présents dans le microbiote intestinal est 10 fois plus élevé que les cellules de notre corps, soit 100 000 milliards
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– « Une flore intestinale déséquilibrée favorise-t-elle le surpoids ? »
– « Quelle alimentation adopter pour une flore intestinale en bonne santé ? »
Sources
1 Crumeyrolle-Arias M, Jaglin M, Bruneau A, et al. Absence of the gut microbiota enhances anxiety-like behavior and neuroendocrine response to acute stress in rats. Psychoneuroendocrinology. 2014;42:207-17.
2 Ait-Belgnaoui A, Durand H, Cartier C, et al. Prevention of gut leakiness by a probiotic treatment leads to attenuated HPA response to an acute psychological stress in rats. Psychoneuroendocrinology. 2012;37(11):1885-95.
3 Nishino R, Mikami K, Takahashi H, et al. Commensal microbiota modulate murine behaviors in a strictly contaminationfree environment confirmed by culture-based methods. Neurogastroenterol Motil. 2013;25(6):521-8.
4 Dinan TG, Cryan F. Melancholic microbes: a link between gut microbiota and depression? Neurogastroenterol Motil.2013;25(9):713–9.
5 Williams BL, Hornig M, Parekh T, Lipkin WI. Application of novel PCR-based methods for detection, quantitation, and phylogeneticcharacterization of Sutterella species in intestinal biopsy samples from children with autism and gastrointestinal disturbances. MBio. 2012 Jan 10;3(1). pii: e00261-11.
6 Kang DW, Park JG, Ilhan ZE, et al. Reduced incidence of Prevotella and other fermenters in intestinal microflora of autistic children. PLoS One.2013 Jul 3;8(7):e68322.3934. Gondalia SV, Palombo EA, Knowles SR, et al. Molecular characterisation of gastrointestinal microbiota of children with autism (with and without gastrointestinal dysfunction) and their neurotypical siblings. Autism Res. 2012;5(6):419-27.
7 Finegold SM, Dowd SE, Gontcharova V, et al. Pyrosequencing study of fecal microflora of autistic and control children. Anaerobe. 2010;16(4):444-53.
8 Krajmalnik-Brown R, Lozupone C, Kang DW, Adams JB. Gut bacteria in children with autism spectrum disorders: challenges and promise of studying how a complex community influences a complex disease. Microb Ecol Health Dis. 2015;26:26914.
De Angelis M, Piccolo M, Vannini L, et al. Fecal microbiota and metabolome of children with autism and pervasive developmental disorder not otherwise specified. PLoS One. 2013 Oct 9;8(10):e76993.
9 McElhanon BO, McCracken C, Karpen S, Sharp WG. Gastrointestinal symptoms in autism spectrum disorder: a meta-analysis. Pediatrics. 2014;133(5):872-83.
10 Gondalia SV, Palombo EA, Knowles SR, et al. Molecular characterisation of gastrointestinal microbiota of children with autism (with and without gastrointestinal dysfunction) and their neurotypical siblings. Autism Res. 2012;5(6):419-27.
11 Clairembault T, Leclair-Visonneau L, Coron E, et al. Structural alterations of the intestinal epithelial barrier in Parkinson’s disease. Acta Neuropathol Commun. 2015;3:12.
12 Scheperjans F, Aho V, Pereira PA, et al. Gut microbiota are related to Parkinson’s disease and clinical phenotype. Mov Disord. 2015;30(3):350-8.
13 Bhattacharjee S, Lukiw WJ. Alzheimer’s disease and the microbiome.Front Cell Neurosci. 2013;7:153